Quand le passé rencontre le présent, et même l'avenir. Jussiê, joueur de Bordeaux de 2007 à 2016, et Alex Dias, Parisien de 2001 à 2002, ont bien voulu nous donner leurs avis sur deux Brésiliens du Championnat de France. L'un est une star du football mondial, candidat régulier au Ballon d'Or et capitaine de la sélection brésilienne. L'autre est un grand espoir qui ne cesse de progresser, tout en étant suivi par de grosses écuries européennes. Neymar et Malcom s'affrontent pour la première fois, ce samedi, à 17 heures pour un duel 100% auriverde, lors de PSG-Bordeaux.
Neymar a-t-il réussi à vous convaincre après son transfert très commenté cet été ?
Alex : Je pense que Neymar est très fort. Qu’il soit devenu le joueur le plus cher de l’histoire prouve sa valeur. Il va faire de très bonnes choses à Paris. Il est très bien entouré et va pouvoir encore plus grandir et s’épanouir là-bas. C’est le meilleur joueur brésilien. S’il reproduit ce qu’il a fait en quatre années à Barcelone, il n’y aura aucun problème.
Jussiê : Neymar reste fidèle à ce qu’il a montré avant. Je connais bien Maxwell mais je ne sais pas tous les détails de son transfert. Quand on connaissait sa place au Barça, il fallait vraiment être convaincant financièrement pour le faire venir à Paris. Ils ont dû lui promettre le ciel et la terre pour ce projet. De plus en plus, il va se sentir à l’aise et connaître ce championnat. Il a une équipe qui joue pour lui.
Que représente Neymar au sein de son pays ?
Alex : C’est l’idole, celui qui porte haut la Seleção. Le fait de gagner les Jeux Olympiques à Rio (en 2016, ndlr.) lui donne encore plus d’importance. C’est le patron et il le fait avec beaucoup d’humilité.
Jussiê : On a trop tendance à se reposer sur lui. À Paris, ça a été le cas avec Ibrahimovic où les gens attendaient que lui seul les sorte du pétrin. Neymar a une autre aura que lui, c’est sûr. Il sera autant attendu au Brésil qu’à Paris où tout le monde s’attend à ce qu’il porte l’équipe jusqu’en demi-finale de la Ligue des Champions.
Qu’est-ce qu’ils ont le plus de Brésilien dans leur façon de jouer ?
Alex : C’est évidemment le dribble. Neymar se rapproche de Ronaldo et de Ronaldinho dans ce sens là. Neymar a des caractéristiques différentes en plus. Il évolue sur un côté ce qui lui donne une grande liberté d'action. Malcom est intéressant aussi dans ses provocations, il n’hésite pas à tenter et même s’il perd des ballons, il a de l’audace. Ça se remarque.
Jussiê : Ce sont des dribbleurs ! Ils cherchent tout le temps à déstabiliser les défenses par ce type de geste. Quand tu es en marquage individuel, pour éliminer un adversaire, tu crées un déséquilibre dans la défense. C’est ce que Malcom et Neymar recherchent constamment.
Est-ce que vous pensez que Malcom rejoindra bientôt la Seleção ?
Alex : je pense que pour la Russie, en 2018, ce sera trop juste. L’équipe actuelle tourne bien et Tite ne prendra pas de risque majeur. Par contre pour l’avenir c’est certain qu’il aura son mot à dire.
Jussiê : Il se rapproche de jour en jour de la sélection s’il garde cette forme-là. Tite est en entraîneur qui tente et aime tester de nouveaux joueurs. Malcom peut intégrer cette rotation.
Malcom commence-t-il à devenir populaire au Brésil ?
Alex : La seule chaîne de télévision brésilienne à diffuser du football français ne passe que les matches du PSG malheureusement. Ici Malcom a très peu de visibilité mais on en parle quand même. Ses meilleures actions sont disponibles sur Internet et on en profite.
Jussiê : On en parlait déjà avant car il vient d’une équipe, les Corinthians, où il a laissé sa trace en tant que champion du Brésil en 2015. Il est parti jeune mais on se souvient de lui, aussi par sa présence dans les équipes espoirs. Il faut savoir que c’est différent, quand tu joues au PSG, on a beaucoup plus d’échos sur toi car il y a des journalistes spécialisés. Il faudrait que Bordeaux joue régulièrement la Ligue des Champions pour qu’on en parle plus. Cependant ses bonnes performances lui permettent de ne pas être oublié au pays.
Ce sont deux joueurs qui expriment ce qu’ils ressentent, notamment sur le terrain. Vous appréciez leurs personnalités ?
Alex : Ils sont typiquement brésilien. Ils font tout avec le sourire. Neymar a très vite compris qu’il devait tisser un lien avec le Parc des Princes. Utiliser les "Ici c’est Paris" et "Paris est magique" lui a permis directement de se faire adopter.
Jussiê : Malcom est quelqu’un de bien entouré. Il a sa famille à côté de lui, tout le temps. Ça donne une certaine tranquillité pour bien travailler. Il n’a pas la grosse tête, ce sont ses proches qui lui transmettent cette simplicité. C’est une personne très joyeuse et facile à vivre ! Neymar est aussi dans ce cas ! Les moments difficiles, il sait les gérer. Être souriant ça peut-être mal perçu mais pour son équipe, cela montre qu’il est en confiance et qu’il peut la diffuser.
Qu’est-ce qui manque à Malcom pour devenir un très grand joueur ?
Alex : Plutôt de l’habilité et de la régularité. Ça passera aussi par une première expérience au sein de la sélection brésilienne. Pour un jeune joueur comme lui ce sera primordial. Il devra aussi quitter Bordeaux. On a parlé de Dortmund cet été. Ce serait un bon tremplin pour lui je pense.
Jussiê : Les gens autour de lui et notamment ses agents ont compris que ça ne servait à rien de partir maintenant. Malgré son jeune âge, il est très mûr dans sa tête. Pour devenir un grand, il doit poursuivre ce qu’il est en train d’accomplir. Dans un match qui manque de rythme, il arrive toujours à faire la différence. Le football c’est être décisif et Malcom l’a compris. Les grands rendez-vous font partie de l’ADN d’un joueur brésilien. On aime ces ambiances, ces stades pleins… Malcom a conscience qu’il doit convaincre dans ce genre de rencontre.
Bien parler français est-il indispensable pour un joueur brésilien afin de s’adapter ?
Alex : C’est vraiment un pays différent et la langue demande un certain apprentissage. Après on fait le même métier que les autres. Le football permet de simplifier la communication et des joueurs comme Malcom et Neymar sont dans ce registre là.
Jussiê : Le changement de langue peut vraiment en surprendre plus d’un. À Bordeaux, un système de cours est mis en place. Une fois par semaine on apprend le français. Ils ont très bien compris que l’adaptation passe par ça. Malcom s’y est mis très sérieusement. Il est à l’écoute.