Il y a quelques années, les habitués des bords de terrain normands prédisaient déjà à Ousmane Dembélé et Samuel Grandsir une carrière de footballeur professionnel. À l’époque, les deux petits phénomènes de la région étaient adversaires de derby à Evreux avant que les clubs de la Madeleine et de l’EAC ne fusionnent. "On a aussi fait des détections ensemble puis nos chemins se sont séparés quand il est parti à Rennes", explique le Troyen qui, deux ans après son ancien voisin, se met à son tour en lumière sur les terrains de Ligue 1.
Quelques doutes vite estompés
Lorsqu’il arrive en 2012 à Troyes, Samuel Grandsir faisait déjà partie des talents nichés dans les championnats nationaux des moins de 17 ans. Un talent brut repéré par l’Estac et ses techniciens prêts à le polir pour l’emmener voir plus haut. "On avait vu de grandes qualités de percussion qui lui donnaient une capacité naturelle d’élimination. Il était déjà capable d’imposer un second changement de rythme sur une première variation et ça c’était très intéressant", se souvient Farès Bouzid, son premier entraîneur dans l’Aube. Malgré d’évidentes qualités, Samuel Grandsir se fond dans la jungle des promis au plus haut niveau et avance, passe les échelons des catégories, sans se construire de vraies certitudes. "Les plus gros doutes, c’était en U19, raconte-t-il après un temps de réflexion. Les catégories jeunes à ce niveau, c’est la guerre. Il faut être vraiment solide mentalement pour réussir à passer le cap". Il ne le passera pas immédiatement mais ne s’écartera jamais de son objectif.
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Des moins de 19 ans où il accumule le temps de jeu, Samuel Grandsir connaît ensuite l’équipe réserve, la CFA et les quelques entraînements avec le groupe professionnel. Le parcours classique d’un jeune joueur pas encore tout à fait conscient qu’il ne lui reste plus qu’à pousser un peu pour que le plafond de verre qui le sépare du monde professionnel ne s’écroule. "Je me suis posé beaucoup de questions avec des grosses périodes de doute où je me demandais si je ne resterais pas toute ma carrière en équipe réserve", explique-t-il. Un cas d’école pour tous les jeunes footballeurs à la détermination coriace et à l’amour du jeu au dessus de tout. "Samuel aime le jeu, quelque soit le match et quelque soit l’adversaire. Je ne l’ai jamais vu se comporter différemment en fonction de qui il avait en face de lui, reprend Farès Bouzid qui relève aussi un des traits de caractère qui l’a amené à réussir : "Il a besoin de se mettre dans un rapport de force, d’être dans la confrontation en permanence et c’est grâce à cela qu’il a avancé".
Le buteur ne s’ignore plus
La suite, c’est la signature de son premier contrat professionnel à partir de laquelle il "s’est vraiment lâché". Une première saison chez les grands, en Ligue 2, où il dispute 32 matches pour 20 titularisations, 3 buts et 2 passes décisives. Son axe de progression, il le sait depuis plusieurs années, se situe dans ses statistiques à améliorer. Pour cela, l’ailier va travailler avec Farès Bouzid pour élargir sa palette. "Dans le processus de sa formation, on lui a fait comprendre qu’il devrait marquer et faire des passes décisives pour passer à l’étape supérieure, détaille le technicien. Il préférait être excentré mais nous l’avons aussi fait jouer en pointe ou en soutien de l’attaquant Il avait besoin de savoir jouer naturellement plus haut sur le terrain sans avoir à toujours décrocher pour toucher le ballon et participer à la construction". S’il n’a jamais été complexé par sa petite taille (1m68) et toujours considéré ses aptitudes physiques comme une force, Samuel Grandsir a dû se convaincre qu’il pouvait être "reclasser". "Avant je me disais que je n’étais pas un buteur, tout simplement parce que je marquais rarement. Mon entraîneur m’a fait bosser devant le but et maintenant je m’y sens mieux".
Poursuivi aux côtés de Jean-Louis Garcia qui lui a aussi beaucoup apporter dans le replacement et la science du jeu, le travail devant les buts semble porter ses fruits. "En fait je me sens toujours comme un ailier mais j’ai compris que je pouvais faire de bonnes choses dans l’axe et dans la surface. J’ai aussi compris l’importance pour un joueur comme moi d’avoir des statistiques". Ses 2 buts inscrits et 2 passes décisives en 8 rencontres de Ligue 1 tendent à le prouver mais ne constituent pas une fin en soi. "Le discours du coach m’aide, explique le principal intéressé. Il me dit de continuer de travailler, de ne pas prendre la grosse tête en dehors du terrain et aussi lorsque je joue. Il me dit que c’est en faisant des choses simples que je pourrais devenir plus fort". Sélectionner pour la première fois en équipe de France Espoirs, une étape dont il se servira pour "atteindre un plus haut niveau et avoir plus confiance en lui", Samuel Grandsir compte enchaîner. "J’aimerai marquer au moins 10 buts cette saison, ça montrerait que je peux être un vrai buteur". Et un joueur au bel avenir, assurément.