Il revêtira peut-être mardi sa première cape de l’équipe de France et, si ce n’est au coup d’envoi du match face à l’Uruguay, il y a fort à parier que Ferland Mendy le fasse au moins en cours de match. "Je n’ai eu aucune indication, soufflait-il tout de même dimanche en conférence de presse. Mais si le coach fait appel à moi, je donnerais tout pour lui rendre sa confiance".
Car la "découverte" de Clairefontaine, qu’il n’avait jamais fréquenté par le passé y compris chez les jeunes, est déjà une belle récompense pour celui qui aura finalement amené son talent à s’exprimer au plus haut niveau. Le parallèle avec la carrière plus linéaire de Presnel Kimpembe, son ancien partenaire de formation au PSG, en dit long sur le chemin parcouru par le latéral de 23 ans, presque condamné pour le football il y a quelques années et qui s’impose aujourd’hui dans le paysage tricolore.
L’histoire de Ferland Mendy prend racine au Paris Saint-Germain. Le natif d’Ecquevilly, dans les Yvelines, y effectue sa préformation et intègre le centre en compagnie de la génération 95 dont les deux illustres représentants sont Adrien Rabiot et… Presnel Kimpembe. À l’époque, Ferland Mendy est en concurrence directe avec le second, lui aussi formé au poste de latéral gauche. "Mais c’est Ferland qui jouait la plupart des matches, se souvient Dylan Batubinsika, formé avec les deux compères et aujourd’hui joueur d’Anvers. Presnel ne jouait pas souvent. Ferland était assez frêle mais il était très vif et technique, incroyable sur les courtes distances".
Élément moteur d’une équipe dans laquelle jouent également Moussa Dembélé ou Kingsley Coman, Ferland Mendy s’éclate sur le terrain et en dehors, où son caractère extraverti et un brin chambreur en fait un personnage incontournable du vestiaire. "Il était tout petit et c’est lui qui passait son temps à chambrer les autres, se souvient Dylan Batubinsika. Il avait ce rire puissant et communicatif qui t’embarquait avec lui ou qui t’énervais beaucoup si tu étais sa cible". Le tableau va se teinter de couleurs plus sombres en raison d’une vilaine blessure autour de laquelle subsiste toujours un certain flou.
Quelle est-elle véritablement ? Dans quelles circonstances est-elle survenue ? Les souvenirs des acteurs du moment restent confus, seule la zone, autour de la hanche, semble raccorder toutes les sources. "Je crois que c’était après un tacle, une infection, un truc rare, explique Batubinsika. Il ne pouvait plus rien faire, il ne pouvait même plus marcher et je me souviens qu’au centre, les jeunes racontaient qu’il risquait même une amputation de la jambe". Une chose est sûre, la chose est sérieuse et son futur est compromis. Après un long séjour à l’hôpital Necker et une période de plusieurs mois de convalescence, Ferland Mendy va rejouer au football. Mais plus vraiment comme avant, à en croire les formateurs parisiens de l’époque qui ne le conservent pas. Qu’importe, les moments de doutes ne suffiront pas à étouffer l’ambition d’un jeune homme qui mettra pas longtemps à reprendre le chemin qui semblait lui être destiné.
Une confiance inébranlable
Un an après son départ du PSG pour le club de Mantes-la-Jolie, Dylan Batubinsika va recroiser son ancien coéquipier qui va lui laisser une drôle d’impression. "Nous étions au CNF pour une opération sur les métiers du football. On faisait des petits matches, il avait beaucoup pris physiquement et il n’avait rien perdu de son football. Toujours la même technique en mouvement, les mêmes gestes, les mêmes courses. Je m’étais dit ‘ok, il est encore plus fort qu’avant. Il va jouer chez les professionnels". La prémonition est bonne, Ferland Mendy rejoint les rangs du Havre où les choses vont se remettre dans l’ordre. "C’était un jeune joueur très percutant et avide de découverte, se souvient Thierry Goudet, l’entraîneur havrais de l’époque qui l’a lancé en Ligue 2. Un potentiel offensif extraordinaire, de la technique et des qualités défensives liées à sa vitesse, bref, toute la panoplie du latéral moderne". En l’espace d’une saison et demie, Ferland Mendy met tout le monde d’accord et rejoint l’Olympique lyonnais qui devance une large concurrence française et européenne durant l’été 2017.
Un temps freiné, le latéral n’a désormais plus de temps à perdre et s’adapte très vite au niveau exigé. "À son arrivée au Havre, il venait de plus bas, il avait eu une grosse blessure mais il avait déjà une grande confiance en lui et il l’a conservée au fil des étapes, témoigne Thierry Goudet sur son évolution. Il s’était imposé très naturellement chez nous, il s’est installé de la même manière à Lyon. Il ne doute jamais de lui, il prend le ballon, percute et va au bout. C’est une forme d’insouciance qui est une force pour lui". Mardi, pour ce qui pourrait être sa première apparition sous le maillot des Bleus face à l'Uruguay, Ferland Mendy pourrait être guidé par cette force qu’il tire à la fois de sa personnalité et de son parcours. Aura-t-il l’occasion de faire ses premiers pas aux côtés de Presnel Kimpembe ? L'histoire aurait un sens.