Avec sa trentaine de mots, l'amendement "Title IX" a interdit toute discrimination sur la base du sexe dans les programmes d'éducation soutenus par l'État fédéral américain.
Il est aussi l'acte de naissance de l'hégémonie américaine sur le "soccer" féminin, comme en témoigne les trois sacres en Coupe du monde (1991, 1999, 2015) et quatre titres olympiques (1996, 2004, 2008, 2012) collectionnés en seulement 34 ans.
Ce texte a obligé les universités, actrices de premier plan du sport de haut-niveau aux Etats-Unis, à créer des programmes sportifs dédiées exclusivement aux étudiantes.
Et c'est le football qui en a le plus profité. "Avoir une équipe de football, cela ne coûte pas trop cher", explique à l'AFP Karen Blumenthal, auteur du livre "Let Me Play: The Story of Title IX: The Law That Changed The Future of Girls in America".
"Vous pouvez utiliser le terrain de l'équipe de football américain, il ne faut pas beaucoup d'équipement, ni beaucoup d'entraîneurs, c'est super facile", souligne-t-elle.
Alors que le basket, le baseball et le football américain sont (encore) les sports les plus pratiqués par les enfants et adolescents américains, le football est sans rival chez les jeunes Américaines.
Plus de 3 millions de joueuses dans les lycées
Selon les chiffres du National Women's Law Center (NWLC), une association de défense des droits des femmes, on recensait 295.000 joueuses de football en 1972 dans les lycées américains, contre 3,32 millions en 2016 !
"Avant le 'Title IX', les jeunes femmes ne pouvait pas pratiquer de sport dans le cadre scolaire (...) Cette loi a clairement été la force motrice qui a ouvert les portes du sport à des femmes dans tout le pays", insiste Neena Chaudhry, l'une des responsables du NWLC.
Lorsque l'équipe féminine des Etats-Unis a disputé son premier match officiel en 1985 dans un tournoi en Italie, elle était formée en grande partie de joueuses issues du système universitaire.
"Elles ne s'étaient entraînées ensemble que pendant trois jours, elles n'avaient pas d'argent, la fédération avait payé les frais de déplacement et leur avait alloué chacune dix dollars par jour pour manger", rappelle Karen Blumenthal.
"Les maillots qu'on leur avait envoyé étaient pour des hommes et il avait fallu faire des travaux de couture pour qu'elles puissent les porter", détaille-t-il.
Parmi ces pionnières, figurait une adolescente, Michelle Akers-Stahl, qui, seulement six années plus tard, en 1991, remportera la première Coupe du monde féminine avec "Team USA" et soulèvera également le trophée de meilleure buteuse de la compétition.
Depuis, les stars successives du foot féminin américain, les "anciennes" comme Abby Wambach (184 buts en 256 sélections), Mia Hamm ou encore Kristine Lilly (354 sélections), et les "actuelles", telles Carli Lloyd et Alex Morgan, sont toutes passées par le système universitaire, avant de faire carrière au plus haut-niveau.
Interdiction de 1921 à 1971
Mais le reste du monde commence à rattraper son retard et certains pays partaient de loin.
Entre 1921 et 1971, la Fédération anglaise (FA) avait purement et simplement interdit la pratique du football aux femmes, rappelle Stefan Szymanski, professeur d'économie du sport à l'université du Michigan.
"A cette époque, la FA avait un certain pouvoir et cette interdiction a été imitée. Alors que le football devenait le sport majeur dans le monde, les femmes en étaient exclues", note cet universitaire.
Pas aux Etats-Unis grâce au "Title IX" qui a "donné un énorme élan au sport féminin", confirme-t-il.
Lors du Mondial-2019, "Team USA" devra se méfier de la France, l'Allemagne, le Japon, ou encore l'Angleterre pour le titre mondial, tandis que la Chine, qui rivalisait avec les Etats-Unis dans les années 1990, est réduit aux seconds rôles.
"Il est possible que comme pour la Chine, les succès des Etats-Unis s'émoussent", reconnait Stefan Szymanski.
"Mais cela sera sans doute moins spectaculaire, car le système universitaire américain va continuer à fournir beaucoup de jeunes joueuses de talent", estime-t-il.