Le FC Andorra avait régulièrement envoyé six ou sept joueurs en sélection, jusqu'à dix quelques rares fois, selon le décompte de la Fédération.
Aujourd'hui, la tendance est à la baisse. Pour les matches contre la Moldavie et la France, la liste du sélectionneur Koldo Alvarez s'est réduite à cinq joueurs du club phare. "Un ou deux sont titulaires régulièrement", précise Joël Romero, spécialiste du football à 'TV Andorre'.
"C'est partout pareil ! On prend les meilleurs. A Paris, à Madrid... Pas uniquement dans le football", se résigne auprès de l'AFP Marc Pujol, international du FC Andorra (36 ans, 82 sél.) mais pas retenu pour le match contre les Bleus en qualifications de l'Euro-2020.
Pujol n'en veut pas à Piqué et concède : "on aime les personnes qui investissent".
Ildefons Lima, capitaine emblématique de l'équipe d'Andorre, avait lui sonné l'alarme sur les réseaux sociaux quand il n'y avait pas un seul Andorran présent le 31 mars au coup d'envoi du match du FC Andorra (victoire 4-2) contre Jupiter (Barcelone).
Une clause pour les Andorrans...
Les temps changent. Piqué a acquis fin 2018 le club doyen de la Principauté (fondé en 1942) grâce à son fonds d'investissement Kosmos, celui qui a déjà défrayé la chronique en rachetant les droits de la Coupe Davis puis en la transformant.
Depuis, le défenseur du FC Barcelone a comblé le passif (200.000 euros) et ne cache pas ses ambitions. Il discute de l'entrée de son coéquipier Lionel Messi au capital et a fixé l'objectif de faire "retentir l'hymne de la Ligue des champions en Andorre"...
Piqué a imprimé la marque du Barça. Il a installé Gabri (ex-joueur de Barcelone) comme entraîneur et Albert Jorquera (ex-gardien de Barcelone) pour le seconder.
Avec des recrues venues d'un échelon supérieur au mercato, le club s'est adjugé le titre de champion de Catalogne amateur et a accédé en Tercera, la 4e division espagnole (semi-pro), une première depuis 2002. Il vise maintenant l'accession en Segunda B (D3), plus fréquentée depuis 24 ans.
Quid des joueurs andorrans dans cette avancée à marche forcée ? Une clause du contrat liant le FC Andorra à Kosmos prévoit que le club reste andorran avec une majorité des joueurs nationaux, que Piqué a promis de promouvoir. Mais la feuille de match donne parfois une impression différente.
"On n'a jamais retrouvé une génération"...
Il n'est "pas sûr que la clause" protégeant les Andorrans "soit maintenue", craint Pujol. "C'est le chemin du professionnalisme", philosophe le joueur.
La nouvelle puissance financière du club de Piqué est parfois réprouvée. A l'extérieur, par des adversaires importunés par cette équipe recomposée. Et en interne par des joueurs locaux condamnés au banc ou aux tribunes.
"Le problème ne vient pas de Piqué. Il est plus profond. On n'a jamais retrouvé une génération après l'arrêt de joueurs importants il y a une quinzaine d'années", analyse Joël Romero.
"Piqué veut professionnaliser. Mais tout ne se fera pas du jour au lendemain", estime Pujol, soulignant qu'il "faut travailler avec les petits". "On sera contents si on a deux ou trois bons pros dans dix ou quinze ans", assure le joueur présent en 2004 contre la France à Montpellier (4-0).
En attendant, dans ce petit pays des Pyrénées où le football s'affiche en sport numéro un (3483 licenciés, 18 clubs) la sélection, 134e au classement Fifa, risque de souffrir face aux Bleus.