"Avant, les journalistes venaient nous voir pour nous demander si on ne connaissait pas telle personne qui s'était fait descendre, maintenant ils viennent pour nous parler de foot", se réjouit Jean-Luc Mingallon, président de Marseille Consolat depuis 33 ans. "Ca j'en suis fier!"
Avec 4 points d'avance sur Luçon, le 4e, qu'elle vient de battre chez lui (2-0), la petite équipe est en course pour la L2, malgré un budget ridicule, le plus petit de National (600.000 euros). Et tout le monde commence à y croire. Au moins 2.000 spectateurs sont attendus vendredi contre Avranches (20h00) dans le bricolé stade de La Martine, coincé au bord de l'autoroute.
Consolat vient pourtant de très loin: depuis l'arrivée à sa tête de Mingallon, que tous ses collaborateurs comparent à Louis Nicollin pour sa faconde et sa collection de maillots, le club a déjà franchi sept échelons, de la DSR au National!
- 'Jouer les Fidel Castro' -
Le succès de cette équipe de la cité du même nom, 4.500 habitants dans des barres d'immeubles au-dessus du grand port maritime, rejaillit sur tous les quartiers Nord. Dans son effectif, des Comoriens tous nés à Marseille -et qui ont disputé les qualifications pour la Coupe d'Afrique des Nations pendant la trêve internationale- et des gamins de cités souvent décriées.
"Ca me fait plaisir d'avoir des joueurs issus de ses quartiers dits difficiles", commente auprès de l'AFP Nicolas Usaï, 41 ans, ex-adjoint à Istres et en place comme entraîneur depuis 18 mois. "On parle toujours de manière négative de ces quartiers, poursuit-il, mais dans les cités il y a en qui réussissent, nous à travers le football, d'autres à travers les études. On a juste une fenêtre médiatique plus grande."
Plus largement, ce succès est aussi "celui d'un autre football", pour Mingallon. "Je ne voudrais pas jouer les Fidel Castro mais on est en passe de monter en L2 avec un budget de 600.000 euros", lance le président.
"Mais +miracle+, je ne veux plus l'entendre", tonne-t-il. "Ce n'est pas un miracle sportif, on a mérité nos points, mais c'est un miracle financier, permanent même."
- 'Budgets de fadas' -
Pour réussir, les Jaune et Vert ont recruté malin, à l'image du latéral gauche dans le 3-5-2 d'Usaï, Salim Laassami, natif de la cité voisine de Font-Vert, et formé à Air Bel, autre très gros club formateur de la ville. L'OM ne l'avait pas gardé après un an au centre de formation.
"En venant des quartiers Nord on les représente un peu plus, les gens s'identifient à nous, raconte le joueur. C'est une belle histoire, mais elle n'est pas finie, il faut continuer à l'écrire."
Il a tenté l'aventure à l'USM Alger, sans succès. "On aimerait tous signer ce contrat pro en France, mais je vais peut-être le signer avec Consolat l'année prochaine", conclut Laassami dans un grand sourire.
Mingallon ne veut "pas donner de leçon", mais "on peut faire autrement que de jouer sa vie", dit-il. "Quand je vois certains présidents avec des budgets de +fadas+, comme Strasbourg, Boulogne, quand ils perdent un match ils sont trop stressés, si eux ne montent pas c'est la catastrophe, nous si on rate la montée, le club ne risque rien."
Consolat est même déjà entré dans le coeur des Marseillais.
"On profite du désamour de l'OM", tempère Usaï. "Les supporters énervés se retrouvent un petit peu dans cette équipe de Consolat, mais on ne va pas se comparer, il suffit que l'OM gagne quatre matches pour qu'on retrouve le Vélodrome plein et prêt à s'embraser."
"Supporter de l'OM" comme tout le monde au GS Consolat, Usaï n'a qu'un souhait: que le sourire du foot marseillais "se transforme en éclat de rire à la fin de l'année".