"Le voir à la télévision, jouer des matches d'Europa League, ça me fait drôle parce qu'il y a quelques mois il était encore là, à côté de moi." Bryan Lasme, l'attaquant de Sochaux, était le camarade de chambre d'Ibrahima Konaté au centre de formation. Aujourd'hui, c'est sur son petit écran qu'il observe l'ascension de son meilleur ami. "On s'appelle deux ou trois fois par semaine, précise-t-il. Ses premiers mois à Leipzig ont été un peu compliqués. Il y avait la langue, les entraînements, mais il s'est bien adapté grâce aux Français qu'il y a là-bas."
Entouré de Dayot Upamecano (19 ans) et Jean-Kévin Augustin (20 ans), avec lesquels il est le plus souvent, Ibrahima Konaté (18 ans) avance à son rythme. Un rythme élevé imposé par celui qui a préféré l'Allemagne à Sochaux pour parfaire sa progression l'été dernier.
"Ce garçon n'est pas comme les autres, commente pour 'Goal' Albert Cartier, son ancien entraîneur. Certains partent avant même d'être indépendants. Lui n'avait pas besoin de rester encore deux ans à Sochaux, d'aller à Rennes ou à Guingamp. Il pouvait le faire, mais pour moi, il n'avait pas besoin de ça." Bryan Lasme reprend : "Il était plus mature que beaucoup d'entre nous. On avait l'impression qu'il n'avait pas son âge."
"Au bout de 5 minutes, je me suis dit que c'était un monstre"
Par sa maturité, l'ancien joueur du Paris FC était "le boss au centre", selon la description donnée par Albert Cartier. "Il était un peu le papa, le référent. Celui qui donnait la ligne de conduite." L'ancien technicien de Sochaux se rappelle de son premier match contre Monaco, en janvier 2017 : "Il avait fait la préparation avec nous après le départ de Jérôme Onguéné. On avait fait des entretiens individuels et je lui avais dit : 'Si je dois t'annoncer que tu joues contre Monaco et Falcao, quelle sera ta réaction ?' Il m'avait répondu : 'Je me concentrerai, j'éviterai de me disperser et je prendrai le maximum de renseignements sur le joueur que j'aurai à marquer.' J'avais trouvé sa réponse très mature. Il avait beaucoup de lucidité, beaucoup de réflexion."
Ce jour-là, Mickaël Alphonse était titulaire. Il se souvient très bien de ce grand gaillard, à l'écoute et performant. "Avant le match, je n'étais pas rassuré parce que je ne le connaissais pas très bien, mais au bout de cinq minutes je me suis dit que c'était un monstre", raconte le latéral droit de 28 ans. "On en parle encore souvent dans le vestiaire, dit-il. Tout s'est fait tellement vite. Le coach Cartier a eu la bonne intuition de le mettre la saison dernière. Il a fallu quelques circonstances pour qu'il joue et après c'était 'merci, au revoir".
L'Euro U19 avec l'équipe de France : l'autre défi de Konaté ?
"Pour moi, il allait signer à Chelsea ou Liverpool sans problème, soutient Mickaël Alphonse. Il a commencé à prendre conscience des choses quand les coups de fil ont commencé à s'enchaîner et au fond de moi, je savais que le club pourrait tout tenter, cela ne suffirait pas." Tout n'a pas été simple pour autant dans l'esprit d'Ibrahima Konaté.
"C'était l'année du BAC, il avait du mal à se concentrer, il ne savait pas quoi faire. Moi, je pensais que c'était mieux qu'il reste une année de plus à Sochaux, pour pouvoir jouer. Mais il était sûr de ses qualités et il a pris le risque de partir à l'étranger", confie Bryan Lasme. Un choix qu'il justifie aujourd'hui avec 15 matches joués sous les couleurs de Leipzig cette saison, dont le dernier la semaine dernière face à Marseille (1-0).
"Qu'il parte dans un club comme Leipzig, axé sur la rigueur et l'autorité, n'est pas illogique, explique Albert Cartier. Il a une projection très claire dans l'avenir. Il sait où il veut aller et comment y arriver." En sélection aussi, Ibrahima Konaté a des objectifs, même si le mois dernier, il ne figurait pas dans la liste de Bernard Diomède pour le Tour Élite U19. "Ibra me parle de l'équipe de France, reconnaît Bryan Lasme. Ça lui fait envie et il fait tout pour être appelé à nouveau." Un autre défi pour Konaté. Un de plus, en vue de l'Euro l'été prochain.
Propos recueillis par Benjamin Quarez