Boycotter, gronder ou encourager ? Toute la semaine, le débat a agité les supporters parisiens qui, au final, ont fait un peu tout ça à la fois.
Le match a débuté par un boycott, celui des membres du Collectif Ultras Paris (CUP), groupe de supporters de 3.000 membres revendiqués, qui a déserté le bas de la tribune Auteuil pour protester après le fiasco du 8e de finale retour de Ligue des champions contre Manchester United.
Sur les sièges vides, des banderoles "On n'oublie pas", "respectez l'institution", "moyens illimités, exigence low-cost" ou encore "Des biftons à la place du coeur" ont été déployées.
Les ultras ont ensuite pris place en tribune, aux cris de "Paris c'est nous!", faisant d'un coup grimper les décibels dans un Parc qui jusqu'alors restait relativement timoré.
L'initiative du CUP, dévoilée par plusieurs médias avant la rencontre, a été diversement appréciée par les supporters rencontrés avant le match par l'AFP.
"C'est chiant"
"Je comprends, ils ont voulu marquer le coup mais c'est chiant parce que tu viens pour voir le spectacle", a déploré Allan, venu de Haute-Marne.
Son ami Hakim, fan de l'OM, trouvait lui aussi le boycott "un peu maladroit pour un Clasico. Même en tant que Marseillais on a envie de voir l'ambiance" au Parc, dit-il.
Corentin et Rémi, deux supporters venus de Mayenne, n'étaient pas sur la même longueur d'onde. L'un était "d'accord" avec les ultras, l'autre plus "partagé": "c'est normal (de râler) parce que la défaite contre Manchester, c'était interdit. Après ce soir c'est Marseille, on ne peut pas boycotter, c'est obligé de mettre une grosse ambiance".
Ancien abonné au Parc pendant dix ans, Jérémy Bouchel-Doré partage ce point de vue.
S'il en veut à cette "équipe de mercenaires", coupables d'une "grosse faute professionnelle à domicile contre l'équipe" de Manchester, le trentenaire ne peut s'empêcher de "les encourager au maximum" le temps du Clasico. "Marseille faut les botter, c'est la guerre!", lâche-t-il.
Tags et communiqué hostiles
Même en l'absence de supporters marseillais, interdits de déplacement, un imposant dispositif policier avait été déployé aux abords du Parc. Et le contrôle à l'entrée du stade devait être assuré par "un contingent renforcé de contrôleurs et stewards", selon les autorités.
Celles-ci redoutaient des incidents après l'agitation des derniers jours au PSG, entre tags hostiles ("Honteux! Sans couille", "Respectez-nous !") au centre d'entraînement et communiqué virulent du CUP accusant des "joueurs sans fierté" de "traîner l'honneur (du) club dans la boue", deux ans après l'humiliante "remontada" (défaite 6-1 au retour) contre le Barça.
Dimanche dernier, plusieurs centaines d'ultras avaient copieusement insulté les joueurs lors d'une séance d'entraînement délocalisée au Parc et ouverte aux abonnés.
Certains supporters n'ont pas apprécié non plus la communication de Thomas Tuchel, qui a critiqué la grève des encouragements lors de sa conférence de presse d'avant-match.
"A mon avis, ce n'est pas mérité et cela n'aide pas. On sait qu'ils sont déçus, ce n'est pas nécessaire de nous le montrer encore, encore et encore. On a compris", a déploré l'entraîneur parisien, réclamant l'union sacrée.
"Tuchel a raison de dire qu'on est ensemble", lâche à l'AFP Grégory Marion, membre du groupe de supporters Tigris Mystic à la fin des années 1990. "Il ne faut pas perdre contre Marseille après Manchester, c'est impossible. Sinon après ça deviendra très, très compliqué pour les joueurs".
Au coup de sifflet final, ces derniers ont quitté la pelouse avec le sentiment du devoir accompli. Mais sans aller saluer la tribune Auteuil...