Les supporters du PSG n'ont pas dû l'oublier. Non pas pour ce qu'il a accompli pour le club de la capitale durant ses six mois passés au Parc, mais pour le triplé qu'il a inscrit dans cette même enceinte le 7 décembre 2004 alors qu'il portait les couleurs du CSKA Moscou (1-3). Aujourd'hui, et même si sa remarquable ligne ne le laisse pas du tout deviner, Sergey Semak n'est plus joueur mais entraineur. Et un entraineur très prometteur, dont le nom est avancé pour succéder à Roberto Mancini du côté de Zenit Saint-Petersbourg.
Genésio : "On s'attend à une confrontation difficile"
À 42 ans, Semak est pleinement concentré sur son nouveau métier. Dans un entretien exclusif pour Goal, il nous parle de ses débuts sur le banc à Ufa et de ses attentes pour le futur. Il revient également sur sa courte escapade dans le championnat français. Enfin, il dresse un regard très intéressant sur le championnat russe et en particulier le CSKA Moscou, son club de cœur qui s'apprête à croiser le fer avec l'Olympique Lyonnais en 8es de finale aller de la Ligue Europa.
" Le métier d'entraineur ? Pour l'instant, tout me plait et me convient"
Vous avez démarré votre carrière d'entraineur il y a un an. Jusque-là tout se passe bien pour vous. Est-ce que c'est un métier que vous avez toujours voulu exercer ?
Sergey Semak : Oui. Après la fin de ma carrière de joueur, j'ai d'abord travaillé en tant qu'entraineur adjoint. Et, bien sûr, il était nécessaire que je dirige l'équipe en tant que coach principal pour savoir si cela allait me plaire ou pas. Finalement, tout me convient et j'apprécie beaucoup ce métier.
Dites-nous en un peu plus sur l'Ufa FC, votre club. Vous êtes 6e du championnat russe, mais c'est un club qu'on ne connait pas beaucoup en France…
Et bien, c'est une équipe jeune et un club assez jeune aussi, qui n'en est qu'à sa quatrième saison en Premier League russe. Et pour moi, un jeune entraineur qui démarre tout juste, coacher dans l'élite ça ne peut qu'être bénéfique.
Quelles ambitions collectives nourrissez-vous avec cette équipe ?
En ce moment, nous essayons de mettre en place une équipe qui puisse se maintenir dans le milieu de tableau du championnat. Mais, dans le futur, on aimerait bien aussi se mêler aux places qualificatives pour les coupes européennes.
Quel est votre style, votre philosophie en tant que coach ?
Je pense que le style de l'entraineur est surtout défini par les joueurs qu'il a à sa disposition et dans son effectif. En ce moment, nous travaillons avec des éléments de qualité et nous essayons donc de construire une bonne équipe en fonction des capacités et du profil de chacun des joueurs.
"Je regrette de ne pas être resté plus longtemps à Paris"
Joueur, vous avez connu une expérience au PSG. Mais vous n'y avez évolué que quelques mois. Quels souvenirs gardez-vous de ce passage à Paris. Et ne regrettez-vous pas de ne pas être resté plus longtemps justement ?
Oui, c'est dommage que j'en sois parti aussi rapidement. J'ai beaucoup aimé Paris et la France. Mais, pour des raisons familiales et les nombreuses opportunités que j'ai reçues des clubs russes à ce moment-là, j'ai pris la décision de retourner dans mon pays. Il n'empêche que je garde de très bons souvenirs de Paris et du championnat français. C'est vraiment dommage que je n'ai pas pu y jouer plus longtemps.
À l'exception de Leonid Sloutski (entraineur de Vitesse Arnhem), il n'y a eu aucun entraîneur russe en Europe. Pourquoi ?
Je pense qu'actuellement, en Russie, il y a un changement de génération. L'ancienne génération commence à s'éclipser, et il y en a une nouvelle qui s'installe et qui est composée d'anciens joueurs ayant évolué en Europe. Ils commencent à travailler en Russie. Sloutski a été le premier à "s'expatrier." Dans le futur, tout dépendra de nos résultats. Si le niveau du football est assez élevé en Russie et que nos clubs se comportent bien sur la scène européenne alors cela ouvrira la porte pour que nos entraineurs soient plus fréquemment invités à coacher à l'étranger.
"Le CSKA est une équipe très expérimentée, mais c'est aussi son défaut"
Ce jeudi, le CSKA Moscou affronte l'Olympique Lyonnais en Europa League. Vous connaissez bien ce club puisque vous avez fait l'essentiel de votre carrière de joueur là-bas. Et vous les avez affrontés comme coach. Parlez-nous un peu des forces et des faiblesses de cette équipe.
Si on parle des forces, je trouve que c'est une équipe assez expérimentée. Les joueurs qui la composent ont un grand vécu de la scène internationale. Et beaucoup d'entre eux évoluent dans des sélections nationales. De ce côté-là, ce sont donc des joueurs aguerris. Je dirais que c'est une équipe qui défend très bien, avec des défenseurs de qualité. Ils avaient surtout des manques en attaque. Mais, je pense que ce problème a été réglé avec le retour du Nigérian Ahmed Musa de Leicester. C'est un attaquant assez rapide. À mon avis, la principale menace vient des milieux de terrain où vous avez des éléments tels que Zobnin et Dzagoev. Ce sont les leaders techniques de l'équipe, ce sont eux qui l'inspirent et qui apportent une touche créative. Et puis, dans les buts, on a Igor Akinfeev, qui évolue depuis très longtemps au CSKA et en équipe nationale russe. À ce poste, vous pouvez être tranquille, c'est un gardien de très grande qualité. Pour ses faiblesses, je dirais que face à des équipes offensives ou qui se projettent vite en contre, le problème peut être la lenteur de la défense. Tous les arrières (Ignashevitch et les frères Berezutski, ndlr) sont maintenant à un âge avancé. S'il y a de la vitesse en face, ils sont dépassés et il faut que toute l'équipe compense. Et ce n'est pas facile.
Des trois équipes russes qui sont toujours en course dans cette Europa League (Zenit, Lokomotiv et le CSKA), laquelle est la mieux placée selon vous pour aller encore plus loin ?
Je dirais que le Zenit et le CSKA sont les mieux placés. Le Zenit a un grand nombre de joueurs de qualité, et ils ont aussi un effectif assez étoffé avec un banc important. Donc, je parierai sur le Zenit, même si le Lokomotiv, à travers son brillant parcours en championnat (1er au classement, ndlr), dégage beaucoup de confiance et affiche de la régularité. Il peut aller encore plus loin. Le CSKA, de son côté, a toujours été bon lors des compétitions de Coupe. C'est un peu leur spécialité. Ils peuvent donc aller plus loin aussi. Mais bon, si je devais n'en choisir qu'un seul, je dirais le Zenit.
"Où je me vois dans 10 ans ? À Paris, comme entraineur"
Comment évaluez-vous le championnat russe aujourd'hui ? A-t-il progressé par rapport à l'époque où vous étiez joueur ?
Oui, c'est une évidence pour moi. Le niveau du championnat russe a augmenté et cela se vérifie à travers la santé de ces clubs. Il y en a trois toujours en lice en Europa League et il est possible que la saison prochaine nous ayons trois représentants en Ligue des Champions. Cela dit beaucoup du niveau de ce championnat. Et puis, dans un autre domaine, il y a tous les nouveaux stades qui ont été construits en vue de la Coupe du Monde. Il y a de très bonnes infrastructures. C'est incontestablement un pas en avant. Quand on voit enfin les capacités financières qu'ont la moitié des clubs de l'élite, on peut dire qu'il y a un grand potentiel de croissance.
Où vous voyez-vous dans cinq, dix ans ?
De retour à Paris (rires).
Vraiment ? En tant qu'entraineur ?
Oui, je pense, qu'il est préférable que ça soit comme entraîneur. Cela dit, y retourner comme touriste et visiter la ville ne me déplairait pas non plus.
Propos recueillis par Naïm Beneddra