"Nous, les supporters, voyons l'action de Daniel Kretinsky plutôt d'un bon oeil, mais d'énormes sommes d'argent qu'il investit dans le club devraient se traduire par des succès largement plus importants", estime par exemple Tomas Pelc, fidèle fan du Sparta Prague.
"Il serait peu réaliste de croire que le Sparta puisse faire souffrir des clubs tels que le Real Madrid, mais ses résultats sont quand même très décevants ces dernières années", médite Tomas, bientôt cinquantenaire, dans un bistrot pragois orné d'un drapeau bleu-jaune-rouge du club de son coeur.
Les activités de Daniel Kretinsky à la tête du Sparta qu'il préside depuis 2004 constituent une cerise sur le gâteau pour ce milliardaire de 43 ans qui a fait fortune dans des opérations boursières puis dans le secteur de l'énergie et qui fait actuellement une entrée fracassante sur le marché médiatique français.
"Daniel Kretinsky est tombé amoureux du Sparta", résume laconiquement le journal populaire en ligne Expres. "Homme d'affaires génial, il n'a pourtant pas réussi ici l'essentiel, à savoir bien choisir ses collaborateurs", estime Expres, loin d'être seul à estimer que M. Kretinsky, trop occupé par ses nombreuses activités, est enclin à confier des postes clés au sein du club à ses amis, avec peu d'expérience en matière du football.
Où sont les neiges d'antan ?
"Durant mon engagement au Sparta (2013-2018), je n'ai rencontré Daniel Kretinsky que deux ou trois fois", a confié à une chaîne de télévision privée l'ex-attaquant international David Lafata, après avoir raccroché ses crampons cet été.
"Surtout après des pépins", s'est-il empressé d'ajouter, avec un petit sourire.
Fondé en 1893, le Sparta qui constitue avec son principal rival local, le Slavia Prague, le duo des deux clubs les plus traditionnels et les plus populaires du pays, a déjà été sacré 36 fois champion (24 dans l'ex-Tchécoslovaquie et 12 depuis la naissance de la République tchèque en 1993). Pavel Nedved, Karel Poborsky, Petr Cech, Wilfried Bony et Tomas Rosicky figurent parmi ses vedettes d'un passé encore assez récent.
Mais où sont les neiges d'antan ? Le club au maillot rouge foncé n'a glané que trois titres de champion au cours des dix dernières années (2007, 2010 et 2014) alors que le majestueux hymne de la Ligue des Champions n'a plus retenti au-dessus du Generali Arena depuis... 2005. Le Sparta, jadis un participant régulier, n'a pas disputé de matchs de C1 depuis déjà treize ans.
Histoire de mettre fin à cette période de vaches maigres, le Sparta a lancé en été 2017 en grande pompe une "internationalisation" de son effectif accompagnée d'une hausse de son budget annuel à environ un milliard de couronnes (39 millions d'euros), sans précédent dans le football tchèque.
"La frustration prend le dessus"
Les résultats du projet incluant l'engagement de l'entraîneur italien Andrea Stramaccioni et d'une kyrielle de joueurs de renom tels que les milieux français Rio Mavuba et camerounais Georges Mandjeck, repartis très rapidement pour cause de performances médiocres, puis du milieu gabonais Guélor Kanga et d'internationaux roumains dont le gardien Florin Nita et le milieu Nicolae Stanciu, ne sont pourtant pas fameux.
Eliminé à deux reprises dès la phase qualificative de la Ligue Europa par des adversaires serbes (l'Etoile Rouge Belgrade en 2017 et le Spartak Subotica cette année), le Sparta n'occupait que la 4e place au Championnat à l'issue de sa 13e journée.
"Pas mal de transferts ont été réalisés de façon irréfléchie. Les recrues n'ont pas créé une équipe homogène", analyse Tomas Pelc, soulignant qu'il désapprouve toutefois le comportement de dizaines d'autres supporters ayant laissé exploser leur colère en faisant irruption sur la pelouse, lors du match contre Subotica.
Daniel Kretinsky, lui, a récemment avoué que "la frustration prend le dessus" après l'élimination du Sparta de la Ligue Europa.
Lors de l'une de ses rares conférences de presse, il a annoncé la venue d'un nouveau directeur général du club, Frantisek Cupr, ex-manager de la holding EPH Energie dont M. Kretinsky possède 94%.
M. Cupr bénéficie d'une "position solide", d'une "grande autorité" et d'une "confiance", a souligné le président du Sparta, dans l'espoir que cette nomination aiderait à assouvir enfin les ambitions de son club.