Ada Hegerberg : "Le Ballon d'or, le plus beau souvenir de ma vie"

Comment jugez-vous l'évolution du football féminin ? 

"Petit à petit, cela se développe même si le chemin est encore long. Il y a toujours des challenges. A Lyon, nous sommes très bien mais nous savons que ce n'est pas le cas partout. Il faut toujours faire avancer les choses pour aller dans le bon sens".

Quels sont les joueuses ou joueurs qui vous ont influencée ? 

"Quand j'étais plus jeune, naturellement, je regardais le football masculin car le football féminin n'était pas souvent télévisé. Mais j'espère qu'aujourd'hui cela change un peu pour les jeunes filles ou garçons car c'est plus médiatisé pour voir aussi les femmes jouer. Je regardais la Ligue des Champions, l'AC Milan, Barcelone, Messi, Ronaldo et surtout aujourd'hui, je les regarde beaucoup pour apprendre des choses".

Etes-vous issue d'une famille de sportifs ? 

"Oui. Mon père et ma mère ont joué en football professionnel au plus haut niveau et ils ont été entraîneurs également. Ce sont mes coaches préférés. Ma soeur (Andrine) évolue aujourd'hui au PSG. Mon frère a pratiqué mais pas en pro. Je n'avais donc pas le choix ! Je suis native d'une petite ville de 7000 habitants et tout le monde dans la famille jouait au football".

Mais vous aimez d'autres sports... 

"Oui, j'ai beaucoup pratiqué le ski de fond. Cela m'a donné de belles qualités physiques, développé la mobilité. Et aussi l'athlétisme, l'escalade, le patinage".

Y a-t-il des entraîneurs qui vous ont marqué ? 

"Oui, mon père. Il a toujours été très proche pour ma carrière, ma mère aussi mais différemment. Toutes les séances suivies avec mon père et ma soeur, depuis que je suis toute jeune, ont fait la différence". 

Qu'appréciez-vous à l'OL ?

"D'être respectée en tant que femme et joueuse. D'avoir les conditions pour être performante au plus haut niveau. L'OL change les mentalités par rapport au regard porté sur les femmes jouant au football en France. Ce club représente une famille entre deux équipes hommes et femmes qui sont très proches et qui se supportent l'une et l'autre. J'apprécie ce respect mutuel. C'est une approche très moderne de la gestion d'un club de football. C'est l'avenir. C'est ma maison depuis quelques années et c'est ici que j'ai la chance de gagner des titres car c'est aussi un club qui a beaucoup gagné".

Donc vous appréciez aussi Jean-Michel Aulas, le président du club. 

"Il a beaucoup fait changer les choses pour nous les femmes. C'est un modèle pour les autres clubs sur la manière d'organiser une équipe au plus haut niveau. Il a bâti ce qui est peut-être la meilleure équipe au monde. Cela donne des résultats après beaucoup d'investissements".

Deux mois après avoir été sacrée Ballon d'or, comment vivez-vous cette consécration ? 

"C'est un moment historique, il ne faut pas l'oublier. La soirée était plus grande que moi, une soirée pour toutes les femmes au-delà du sport. Cela m'a beaucoup apporté, de motivation surtout pour continuer au plus haut niveau, le respect qui a confirmé ce pour quoi j'ai travaillé toute ma vie au cours de ma carrière. C'est le plus beau souvenir de ma vie".

Et maintenant, vous avez plus de pression ? 

"La pression et l'exigence viennent toujours de moi et ce sera toujours le cas".

Est-ce que vous avez un devoir d'exemple ? 

R: "Oui. Cela montre aux filles que c'est possible de devenir quelqu'un, la meilleure avec beaucoup de travail et de vivre de son sport. D'autres filles peuvent rêver aujourd'hui de devenir Ballon d'or".

Et vous, vous voulez aller encore plus haut...

"J'ai encore envie de travailler beaucoup de choses dans mon jeu. La carrière est courte. Il faut tout faire pour atteindre le maximum de mon potentiel. Plutôt que d'aller chercher un deuxième ou troisième Ballon d'or, j'ai encore envie d'aller chercher des titres, d'être la meilleure buteuse comme actuellement".

Le fait pour vous de ne pas jouer le Mondial en France, c'est un pincement au coeur ? 

"Non, car la décision a été prise bien avant que nous sachions que le Mondial serait organisé en France. C'est dur. Il faut parfois  faire des choix difficiles. Cette décision fait partie de ces choix et je suis sereine avec celle-ci car elle était importante pour continuer au plus haut niveau même si c'est en France ou si la Norvège gagne. Il faut croire en ses valeurs".

Propos recueillis par François-Jean TIXIER