Aux Etats-Unis, stars et paillettes pour que le "soccer" prenne définitivement

A l'entrée du FedEx Field, Vikrom Ahuja a, lui, des heures d'avance, mais il court quand même, maillot de Manchester United sur le dos. Et vu le prix de son sésame pour ce match amical face au FC Barcelone (480 dollars), il espère bien voir une nuée de stars qu'il n'a pas l'habitude d'admirer.
Ce fan des 'Red Devils' depuis l'époque où il étudiait en Angleterre ne va jamais voir des matches de MLS, le Championnat nord-américain, car cela ne l'"excite pas".
Mais le duel entre le Barça et Manchester United, même sans enjeu, "est une opportunité unique" pour un amateur vivant aux Etats-Unis, explique-t-il à l'AFP.
"Nous avons (Paul) Pogba et de nouveaux joueurs. Barcelone a les meilleurs buteurs du monde, la MSN", le trio Messi-Suarez-Neymar", se délecte l'étudiant en médecine de 26 ans vivant à Chicago.
Samedi dernier, il se trouvait en Californie pour suivre le choc entre Manchester United et le Real Madrid.
Dans un pays où le football se joue d'ordinaire avec les mains, les Etats-Unis accueillent pour le cinquième été consécutif l'International Champion's Cup (ICC), tournée estivale rassemblant de grosses écuries européennes, dans l'espoir d'élargir le public de ce sport.
Bière offerte
Comme point d'orgue, Miami (Floride) sera l'écrin d'un très attendu 'Clasico' entre le Real Madrid et le FC Barcelone samedi soir. Le Paris SG ou la Juventus Turin, finaliste de la dernière Ligue des champions, ont également traversé l'Atlantique.
Résultat: des stades pleins à craquer, même loin des centres-villes, et des billets qui s'arrachent à des sommes astronomiques, là où la MLS doit parfois aller jusqu'à offrir la bière pour écouler les places. De quoi donner au football l'espoir de conquérir le coeur des Américains ? Pas si simple.
Eric Wesner, vêtu d'un maillot noir des Etats-Unis, va de temps à autre au stade pour soutenir l'équipe de Washington, DC United, mais s'il s'est résolu à payer "200 balles" pour le match de mercredi, à trois heures de chez lui, c'est pour "voir beaucoup de stars" et parce que "le niveau est bien plus relevé qu'en MLS".
Le même soir, dans l'Ouest américain, Jamie et "C.J." avaient fait le déplacement de Las Vegas (Nevada) jusqu'à Los Angeles (Californie), pour voir leur équipe de coeur, le Real Madrid, affronter Manchester City devant 93 000 spectateurs.
"On va voir sur le terrain des mecs comme Modric, Agüero, c'est quand même génial", résument-ils. Prix de l'opération, billets, avions et hôtel compris : 1 000 dollars. "Mais ça les vaut", prédisent-ils, "c'est unique de voir un match entre ces deux grandes équipes".
Faux problème
Comment expliquer cette effervescence dans l'un des rares pays où le ballon rond n'est pas roi ?
80 162 spectateurs à Landover mercredi, 82 104 pour le Juventus-Barcelone du week-end précédent dans le New Jersey, l'ICC affole les compteurs.
"Le foot est en fait assez populaire aux Etats-Unis, donc ces chiffres ne m'étonnent pas. Il y a une déconnexion entre ce que les médias présentent en terme d'événements sportifs et ce qui se passe réellement dans ce pays", affirme à l'AFP Laurent Dubois, professeur à la Duke University et auteur de "The Language of the Game : How to Understand Soccer" ("Le langage du jeu: comment comprendre le football").
Pour ce spécialiste, il y a "probablement plus de personnes qui jouent au foot dans ce pays que n'importe quel autre sport", mais "le football américain, le basket et le baseball font de l'ombre" au "soccer", notamment pour des questions de revenus publicitaires.
La question de la présence de stars en MLS est pour lui un faux problème. Pendant que certains sont focalisés sur cela, dit-il, "la culture des fans qui soutiennent des équipes locales continue de grossir".
En attendant, reprend Vikrom Ahuja, il assisterait bien au Real-Barça s'il le pouvait. Mais après deux matches, il est déjà "fauché".