Espagne: Luis Enrique, un fort caractère qui a réveillé le Barça

"Je ne serai pas l'entraîneur du FC Barcelone la saison prochaine", a annoncé mercredi soir le technicien espagnol, lors de sa conférence de presse après la victoire du Barça contre Gijon (6-1) en championnat.
"La raison, c'est la manière dont je vis cette profession. Cela signifie pour moi très peu d'heures de repos et de déconnexion", a ajouté Luis Enrique, vainqueur de huit titres sur dix possibles en deux saisons et demi avec le Barça.
Les fermes convictions et le verbe haut de Luis Enrique Martinez Garcia, 46 ans, auront fait des étincelles durant cette période, notamment auprès de Lionel Messi, avec qui on l'avait brièvement dit brouillé en janvier 2015.
Mais le technicien, idole du Camp Nou lorsqu'il était joueur, a tenu bon et endigué le déclin annoncé du Barça: dès sa première saison, il a remporté un triplé historique Liga-Coupe-Ligue des champions, avant d'enchaîner sur un doublé Coupe-Liga en 2016 et d'avoir encore trois mois devant lui pour glaner ses ultimes trophées barcelonais.
En cela, Luis Enrique a marché sur les traces de son ami et prédécesseur Josep Guardiola. L'emblématique technicien catalan (2008-2012) avait lui aussi réussi un retentissant "triplete" dès sa première saison sur le banc barcelonais, en 2009.
Cette année-là, "Lucho" avait succédé à "Pep" aux commandes de la réserve du club, pour sa toute première expérience d'entraîneur. Sous ses ordres, le Barça B était montré en deuxième division et Luis Enrique avait marqué des points pour diriger un jour l'équipe première de son club de cœur.
Héros au Barça, haï à Madrid
Contrairement à Guardiola le Catalan, pur produit de la "Masia" barcelonaise, le natif de Gijon (Asturies) est un converti à la cause blaugrana.
Et, trajectoire rare, c'est un ancien joueur du Real Madrid (1991-1996) qui a renié sa période merengue pour devenir un héros sous le maillot du FC Barcelone (1996-2004).
Déjà, ce joueur polyvalent, attaquant, ailier ou milieu de terrain, avait fait montre d'un caractère bien trempé, semblant se délecter de la détestation des supporteurs madrilènes.
International à 62 reprises avec l'Espagne, il a aussi connu les triomphes (or olympique à Barcelone en 1992) et les désillusions internationales. Comme par exemple l'élimination contre l'Italie en quarts du Mondial-1994 aux Etats-Unis, où son nez ensanglanté par un coup de coude non sanctionné était devenu l'emblème d'une "Roja" qui semblait alors condamnée à la défaite.
Ce bagage de joueur et ce caractère bien trempé ont servi par la suite à l'entraîneur Luis Enrique, tatouages sur le bras et physique toujours affûté par la pratique du cyclisme.
De Totti à Messi
Si son passage plutôt réussi au Celta Vigo (2013-2014) a favorisé sa nomination au Barça, les choses avaient été plus mitigées à l'AS Rome (2011-2012), où le technicien osa écarter Francesco Totti, le capitaine et idole des tifosi.
De même, à Barcelone, l'entraîneur asturien a vu son autorité vaciller en janvier 2015. Messi, laissé sur le banc au coup d'envoi d'un match perdu contre la Real Sociedad (1-0), s'était fait porter pâle dès le lendemain, une attitude qui avait mis tout le Barça en alerte et déclenché une violente crise interne.
Mais Luis Enrique, souvent ironique ou cassant en conférence de presse, avait eu cette fois la souplesse nécessaire pour ménager l'Argentin, dont le rendement était ensuite redevenu flamboyant.
Dans cet épisode, Luis Enrique a montré ses qualités de meneur. "Le jour où je verrai que mes joueurs ne me suivent plus, avait expliqué le technicien, j'arrête tout".
La déroute en huitièmes de finale aller de Ligue des champions contre Paris (4-0), mi-février, a peut-être précipité sa décision de s'en aller. En espérant que ses joueurs le suivent encore jusqu'en juin.