Il fut une époque pas si lointaine où l'Angleterre marchait sur l'Europe. Comme l'Italie avant elle, comme l'Espagne après, la Premier League a frappé fort au cœur des années 2000 mais cette tendance s'est effritée progressivement. De l'autre côté de la Manche, ce problème un peu tabou est devenu un sujet qui pique, comme s'il était un contre-argument aux défenseurs du football anglais. Car la Premier League a beau être la compétition nationale la plus lucrative d'Europe, sa seule influence économique ne suffit pas. Le vrai baromètre se situe ailleurs. Dans les grandes batailles européennes.
L'automne avait apporté une première réponse avec le sans-faute de ses cinq représentants : Manchester City, Tottenham, Liverpool, Chelsea et Manchester United. Et en attendant les résultats de cette semaine, les trois premiers sont déjà dans des postures très favorables. City a récité son football à Bâle (0-4), les Reds ont ébloui leur monde à Porto (0-5), et les 'Spurs' ont fait une très belle opération sur le terrain de la Juve (2-2). Les scores parlent, donc, mais l'impression laissée est encore plus forte. Comment expliquer ce retour au premier plan des clubs anglais ?
Un championnat porté par ses techniciens
En dépit de sa puissance financière, la Premier League n'abrite aucun des trois meilleurs joueurs du monde. Cristiano Ronaldo l'a quittée pour rejoindre Lionel Messi en Espagne, quand Neymar a commencé à écrire l'histoire que l'on sait à Paris. Un drôle de paradoxe que l'Angleterre comble par la qualité de ses entraîneurs étrangers. Car depuis quelques années, les clubs anglais sont drivés par la crème de la crème en la matière. Pep Guardiola et José Mourinho, si différents, si charismatiques, prennent beaucoup de place à Manchester. L'Espagnol a mené City au sommet avec un projet brillant quand le Special One use encore de ses armes habituelles pour ramener des titres à United dans l'ère post-Ferguson.
Derrière eux, les clubs majeurs du pays peuvent également compter sur des entraîneurs respectés et remarqués, à l'image d'Antonio Conte, qui a conduit Chelsea à un nouveau sacre pour sa première année sur le sol anglais. Jürgen Klopp est aussi une figure qui compte. Son équipe de Liverpool porte sa griffe. Et derrière le taulier Arsène Wenger, Mauricio Pochettino, qui n'en finit plus de grimper, a énormément fait progresser Tottenham. On dit qu'une équipe ressemble à son entraîneur, c'est un principe vieux comme le foot.
Une approche différente pour la Coupe d’Europe
Longtemps, la Premier League a aussi été plombée par son sens des priorités. Il faut dire qu'en comparaison avec ses voisins, elle est le championnat le plus homogène d'Europe, en particulier pour le suspense qu'elle offre pour le titre. Son respect pour les traditions, sa culture foot et ses rivalités font aussi sa force. Mais en Coupe d'Europe, tous ces attraits se sont retournés contre elle. La donne a changé depuis quelques années sous l'impulsion de ses têtes pensantes étrangères. "J'ai l'impression que les clubs anglais comptent vraiment en Ligue des champions", a noté Pep Guardiola la semaine passée. C'est une bonne nouvelle pour l'Angleterre que ses clubs aient obtenu d'excellents résultats cette semaine. On va voir ce que Manchester United et Chelsea feront. Dans les quatre ou cinq années, on verra si ces clubs peuvent atteindre les quarts de finale, les demi-finales ou même une finale. Mais c'est vraiment une bonne chose".
Le même Guardiola a été encore plus loin. Pour le manager de Manchester City, la compétitivité nouvelle des clubs anglais sur la scène européenne résulte aussi d'une approche mentale bien précise. "Il faut avoir conscience que la Ligue des champions est une autre compétition. C'est complètement différent. La Ligue des champions, c'est aussi une question de contrôle émotionnel. Apprendre à gérer les moments difficiles. C'est ça la Ligue des champions. Nous avons inscrit six buts la saison dernière et nous avons été éliminés parce que nous en concédé six. Nous n'avons pas su gérer les moments difficiles. Peu importe l'équipe que vous affrontez, ces moments difficiles se produiront lors des 180 minutes. C'est très important". En d'autres termes, Manchester City a payé pour apprendre. Un processus auquel se confronte un autre nouveau-riche comme le Paris Saint-Germain.
Des attaques de feu
La Premier League a du pétrole ET des idées. C'est un peu le constat qui se dégage de son évolution. Et c'est ce qui lui permet aujourd'hui de présenter quelques-unes des équipes les plus spectaculaires d'Europe. Le Manchester City de Pep Guardiola est évidemment la référence du moment. C'est une machine collective réglée comme du papier à musique où tout le monde joue la même partition. Avec un secteur offensif impressionnant (De Bruyne, Agüero, Gabriel Jesus, Sterling, L. Sané, David Silva, Bernardo Silva...), les 'Citizens', qui volent vers le titre de champion d'Angleterre, présentent la deuxième meilleure attaque d'Europe derrière le PSG. Cette équipe est aussi celle qui affiche la possession de balle la plus importante sur le continent.