Toutes proportions gardées et si on excepte aussi les cheveux roses - elle les a châtains, longs et attachés, on peut dire qu'il y a du Megan Rapinoe chez cette Québécoise de bientôt 24 ans, déterminée et à la tête bien faite, diplômée de l'Université de Cincinnati en Justice criminelle.
Vanessa Gilles est une citoyenne du monde, riche d'expériences, de rencontres. Elle a vécu en Chine, au Vietnam au gré des pérégrinations professionnelles de ses parents, a joué à un bon niveau au tennis. Puis après son cursus universitaire, elle est partie six mois à Chypre où elle a découvert une première facette du foot féminin européen.
Depuis un an et demi, elle a posé son baluchon à Bordeaux où elle sévit en défenseure avant tout physique - "c'est davantage ma culture" - et respectée de l'actuelle troisième de la D1 féminine.
Un championnat beaucoup plus pro, qui la fait vivre et dans lequel elle parfait sa technique au milieu de ses partenaires internationales françaises (Viviane Asseyi, Charlotte Bilbault, Estelle Cascarino, Ouleymata Sarr) qu'elle espère croiser mercredi, à Calais, en ouverture du Tournoi de France.
Passée par les Bleuettes
Espère, car depuis un an qu'elle a choisi de porter les couleurs du Canada, la hiérarchie semble figée au poste d'arrière centrale où elle demeure le quatrième choix, comme lors du Mondial féminin vécu sur le banc l'an passé en France.
Frustrant ? "C'est un environnement différent. Si tu es méritante, tu vas jouer et si tu es sur le banc, tu vas apprendre. Il faut juste patienter et saisir la moindre opportunité. Ça ne fait qu'un an que j'ai rejoint la sélection, je ne suis pas pressée, je sais que je progresse en club", médite celle qui a côtoyé Asseyi et Cascarino en 2018... avec les Bleuettes, l'équipe de France des moins de 23 ans, avant d'opter sans regret pour le maillot à la feuille d'érable.
"J'ai pu voir l'ambiance, l'environnement et rencontrer plusieurs joueuses avec lesquelles je joue aujourd'hui, confie-t-elle. Mais la différence de culture, d'ambiance m'ont amené non pas à choisir, mais à vouloir jouer plutôt pour le Canada. Je me sens mieux avec mes coéquipières canadiennes, on a la même philosophie, on a toutes grandi un peu ensemble, avec les mêmes visions du jeu, le même langage."
Question langage, elle s'y connait aussi. A l'instar de son aînée américaine Rapinoe, figure féministe combattant l'inégalité salariale entre femmes et hommes, Vanessa Gilles n'est pas du genre à trembler devant un auditoire pour porter sa cause.
Discours à l'ONU
Pour preuve, il y a un an, lors d'une tournée aux États-Unis des joueuses de Bordeaux, la Canadienne a pris le micro à l'ONU, telle une ambassadrice.
"C'est un bien grand mot, sourit-elle. Mais je pense que j'aimerais l'être dans le futur, plus que je le suis en ce moment, concentrée sur ma carrière. Même si je sais que quand tu es dans ce monde, c'est compliqué de pousser la barrière."
A l'époque, son message était explicite : "J'ai vécu dans six pays différents et le foot m'a permis de voir comment sont traitées les footeuses mais aussi les athlètes féminines un peu partout. A l'université, j'ai pu voir quelles étaient nos options pour pouvoir jouer professionnellement", avec le constat que "les hommes ont 700 fois plus de chances de devenir sportif professionnel que les femmes".
"Voir ces différences d'opportunités, c'est ce qui me pousse à vouloir parler pour ceux qui n'ont pas de voix ou qui n'ont pas pu arriver là où je suis aujourd'hui", conclut-elle.